Il y avait un bosquet à la lisière du village. Les arbres imposants bloquaient la lumière, créant un havre d'ombres où des créatures étranges se faufilaient sous les fougères. Ce lieu mystérieux abritait des satyres, des fées, des dieux et des déesses des temps anciens.
Dans cette clairière paisible, ils vivaient leurs derniers instants, oubliés de tous et de toutes. Rares étaient les humains qui osaient franchir les limites de cet endroit enchanté. Parfois, des enfants s'y aventuraient, mais ils en ressortaient rapidement, effrayés par les créatures espiègles qui s'amusaient à leurs dépens.
Un jour, une jeune femme du village décida de braver cet interdit. L'idée qu'un lieu puisse être interdit à sa race lui était insupportable. Pour elle, l'ordre et la raison devaient régner. La fantaisie n'avait pas sa place, et encore moins les créatures enchantées.
Elle attendit le zénith, quand la lumière était la plus intense et les ombres plus discrètes. Elle espérait ainsi surprendre les êtres qui peuplaient le bosquet. À son arrivée, elle découvrit ces créatures endormies, paisibles et inconscientes du danger.
Profitant de leur vulnérabilité, elle transperça leurs cœurs dans leur sommeil, réduisant le bosquet à un silence oppressant. Épuisée par son massacre, elle n'eut pas la force de retourner au village et s'endormit à l'ombre des arbres.
Mais on ne détruit pas si facilement les satyres, fées, dieux et déesses. Ces êtres ne sont pas faits de chair et de sang, mais de rêves et d'imagination, de contes et de légendes. Ils prirent possession de l'esprit de l'endormie.
En proie à la folie, la jeune femme s'arracha le cœur pour libérer ce qu'elle avait cru anéantir. Telle une chrysalide, elle libéra ainsi la bête qui sommeillait en elle, devenant à son tour une créature du bosquet.